Mère Nature & Queen(Ares) – Interview
Mère Nature & Queen(Ares) – Interview
Si Queen(Ares) a d’abord sorti deux titres en octobre 2019 et janvier 2020 (« Swarm » et « Fall »), c’est en juin 2021 que le quatuor décide de sortir From this ground, from this sea bien que les titres de cet album ait été enregistré avant la pandémie en 2020. Le contexte de sortie de leur LP ayant ainsi involontairement offert un nouvel éclairage aux thèmes qu’ils abordent. Composé de membres de Big Bernie, Junon, The Lumberjack Feedback, nous avons rencontré le chanteur et guitariste du groupe, Charly Millioz, pour évoquer comment cette formation a trouvé son identité à travers la fabrication de cet album et les envies de chacun.
Comment s’est créé le groupe ? Vous vous êtes formé avec l’idée de faire du post-metal ou c’est une sensibilité collective qui s’est dégagée au cours de plusieurs séances de répétitions ? Sachant que parmi vous, il y en a également qui compose de la folk, du math-rock et du post-hardcore.
Je crois que les choses se sont faites naturellement. Nous étions tous arrivés à un point où jouer une musique plus abrasive et puissante nous manquait. Le groupe existait avant que je le rejoigne ; quand Max [bassiste du groupe, ndr] m’a dit qu’il cherchait un guitariste pour un projet metal/hardcore j’ai tout de suite tenté ma chance ! On se nourrit de nos diverses influences
Le chant en anglais s’est imposé de lui-même ?
Il me semble que oui. C’est plus facile d’évoquer certaines idées abstraites en anglais sans avoir l’air trop pompeux. Mais rien n’est exclu pour la suite !
From this ground, from this sea a été enregistré en 2020 avant la pandémie, abordant des thèmes comme la décadence de l’humanité et la crise écologique qu’elle inflige à la terre, mais il est sorti en juin 2021. Est-ce que la crise sanitaire vous a amené à modifier ce que vous aviez enregistré ? Ou le contexte de la sortie suffisait à donner à l’album une résonance supplémentaire, à l’ouvrir à cette actualité, comme une continuation de vos intentions initiales ?
Cette période n’a pas modifié notre musique de manière consciente, mais il semble compréhensible que cet album et ses textes soient reçus différemment à la lumière des événements de ces derniers mois. Pour autant, nous n’écrivons pas nos textes intentionnellement dans un but politique ou vis-à-vis d’un élément spécifique. C’est quelque chose qui n’intervient pas notre démarche qui est plutôt naturelle et de l’ordre de la spontanéité.
Si l’on se réfère aux titres de l’album et des chansons, From this ground, from this sea peut suivre une trajectoire verticale, de l’espace vers la profondeur des océans. Le choix du premier titre de l’album, « Swarm », est-il une référence à la mission de l’agence spatiale européenne du même nom pour laquelle trois satellites ont été mis en orbite autour de la Terre pour en étudier les sources de champ magnétique ?
Je crois qu’aucun de nous n’était informé de l’existence de cette mission à la création de morceau.
Swarm (qui désigne un essaim ou plus généralement une colonie d’insecte en anglais) évoque plutôt le fourmillement incessant des personnes dans une grande métropole comme Lille, ainsi que les dérives que cela entraîne – presque naturellement. L’ambiance du titre est plus proche de Taxi Driver que de Gravity si tu préfères.
L’album se clôt sur « Silent Changes », qui succèdent à « Fall » et « The Fragile Shells ». Ce silence après la chute n’apparaît pas seulement comme une fatalité mais aussi comme une opportunité de renouveau, après avoir fait le vide et changer à un niveau profond et intime. Mais peut-être que je surinterprète…
C’est superbe que cet enchaînement de titres évoque autant de sens lors de l’écoute. Pour nous, la tracklist était principalement une question de rythme et de ressenti.
À mon sens, la pochette de l’album illustre bien ce que l’on peut entendre avec votre musique. Un bateau échoué qui a pourri avec le temps et qui renvoie à la fin d’un cycle où l’homme est absent avec du rouge et du bleu en couleurs dominantes. Le visuel ne dit d’ailleurs pas si la photo a été prise à l’aube ou au crépuscule. C’est aussi un moyen de soutenir l’idée d’un renouveau incertain ? Comment a été conçu ce visuel ?
La pochette de l’album est une collaboration entre la photographe Clotilde Cadart et l’artiste Morganne Borowczyk. Notre batteur Nico avait remarqué cette épave, ça nous a immédiatement plu puisque cet objet renvoie aux différentes thématiques, comme l’écologie, abordées dans les paroles de l’album. Clotilde l’a donc photographié pour nous. Morganne a fait un superbe travail sur les couleurs et l’ambiance de cette image – j’adore cette pochette, et c’est un honneur qu’elle serve d’écrin à notre musique.
Il existe un visuel alternatif à votre album qui a été créé par Morganne Borowczyk où l’on voit les mains d’une femme allongée au fond de l’eau tenant une épée. Le but était de renforcer l’idée d’un renouveau en cohérence avec les ressources de la planète ? D’autant que ce visuel est disponible en ocre, bleu et rouge, des couleurs renvoyant à la terre, l’eau et le feu.
Effectivement nous avons à nouveau fait appel à Morganne pour le design de notre édition limitée. Le personnage évoque surtout le nom du groupe et fait suite à un visuel qu’elle avait développé pour un design de t-shirt. L’idée pour ces visuels était de faire quelque chose de conceptuel, relié au passé et un brin ésotérique à travers la représentation d’une guerrière armée d’une dague en forme de flamme et damassée et portant le squelette d’une mâchoire en guise de couronne. Et tu as raison sur le lien avec les éléments naturels, puisque nous avons nommé ces éditions Ground, Sea et Blood, en lien avec le titre de l’album, et les paroles de Heir et Burn.
Vous aviez des références musicales en tête lorsque vous avez composé l’album ? Comme beaucoup d’autres, j’ai pensé à Hangman’s Chair lorsque j’ai écouté From this ground, from this sea.
Je ne pense pas que nous avions d’artiste particulier en tête, et les influences de chacun sont venues nourrir le processus d’écriture. Je suis un fan de longue date de The Cure, Failure, et Celtic Frost – je pense que ça transparaît assez clairement dans nos morceaux.
La rédaction de Guitar Part Magazine vous a classé 1er dans la catégorie « Meilleures révélations françaises », et 2ème dans la catégorie « Meilleurs albums français » juste derrière Gojira. Quel effet ça vous a fait ? C’est une annonce qui est tombée de nulle part pour vous, vous saviez que vous aviez été nommée ?
Alexis Renaux, guitariste dans Queen(Ares) mais aussi dans Junon, connaît le rédacteur le chef du magazine et celui-ci a flashé sur notre album. C’est assez fou de se retrouver deuxième d’un classement juste derrière Gojira ! Et ça l’est tout autant de se faire interviewé par New Noise, sachant que c’est un magazine que l’on lisait quand on était gosse.
Quels sont vos projets ? Est-ce que vous avez des concerts de prévus ?
Malheureusement nos concerts pour le début d’année 2022 ont été annulés les uns après les autres, la faute à un certain virus dont on taira le nom. Le but étant de jouer nos morceaux en live, nous sommes donc en train de planifier de nouvelles dates et avons attaqué en parallèle l’écriture de nouveaux morceaux en vue d’une prochaine sortie !
Propos recueillis par Florent Le Toullec