Le grand détournement de MAXI CAT – Interview

Le grand détournement de MAXI CAT – Interview

Après avoir interviewé Gates of Morgul, Ëmgalaï Grafik et Sylvain Cnudde, on a rencontré le graphiste Maxi Cat qui a collaboré avec Cerbère Coryphée à travers des sérigraphies pour nos concerts de SLIFT, MONOLORD ou encore 30,000 MONKIES. Adepte du détournement et du collage pour un résultat toujours louche, on a voulu en savoir plus sur l’esthétique d' »Images Radioactives » qu’il exprime autant sur des affiches, des papertoys ou des goodies en tout genre.

Passion minou

D’où vient ton pseudo Maxi Cat ?

C’est simplement une contraction de mon prénom et de mon nom de famille. Du coup, rien à voir avec les chats en fait. Par contre, heureux hasard, j’adore les minous ! J’en ai deux et ces bestioles tapent l’incruste régulièrement dans ma production sous des formes plus ou moins bienveillantes.

Graphiste, c’est ton métier à temps plein ? Comment as-tu débuté ?

Je travaille dans le secteur de l’industrie graphique depuis une petite quinzaine d’année et je bosse autant sur des machines d’impression qu’en tant que graphiste. Enfin graphiste, je parle là de pondre des flyers pour des kébabs louches ou des opticiens hein ! La créativité, je la garde pour mes trucs persos. J’ai découvert l’univers du poster et de la sérigraphie artistique avec la scène lilloise il y a environ 6 ou 7 ans avec Johan Jaccob, l’atelier Sabordage ou encore la micro-édition du Cagibi. J’avais toujours bidouillé des trucs graphiques dans mon coin mais jamais rien de bien sérieux ni d’imprimé. Du coup, j’ai fait le lien avec la technique que j’avais acquis dans le cadre de mon taf et je me suis mis à faire des sérigraphies de mes créas chez moi en mode DIY. Je pense que c’était aussi un peu pour sortir du cadre industriel et craignos que je connaissais dans le cadre de mon boulot.

Qu’est-ce qui te plaît tant dans la sérigraphie ?

J’aime bien le côté simple comme un pochoir et en même temps, ça te permet de sortir des choses très techniques ou impressionnantes graphiquement. On peut faire tout autant des aplats de couleurs que des trames fines ou de la photo ; utiliser des encres de tous types même spéciales genre or, argent, fluo ou paillettes. ; imprimer sur à peu près tout et n’importe quoi comme passer d’affiches aux t-shirts. Et puis surtout avec quelques adaptations, on peut imprimer n’importe où ! J’ai d’ailleurs inclus ça dès le départ sur les fests. Je fais très souvent sur mon stand de la production imprimée en direct. Même si des fois, c’est un peu la guerre niveau condition de travail !

 

« C’est vraiment très intéressant »

Ton esthétique repose sur le collage et le détournement et très souvent sur celui de marques et de figures populaires des années 80. Tu n’aurais pas grandit devant Canal + et Message à Caractère Informatif par hasard ?

Étant né en 87, j’ai plutôt été marqué par les années 90. Mais oui, certaines émissions comme la série trop méconnue LE BIDULE ou LES DESCHIENS ont certainement eues une influence sur mon sens de l’humour. En fait, la nostalgie ça me parle surtout sous l’angle de la satire. J’ai tendance à me servir de mes souvenirs d’enfance et de les pervertir pour faire marrer les gens. Et qu’on le veuille ou non, les marques et les packagings en font partie : on a tous eu dans les mains une boîte de Happy Meal ou un 45 tour. Détourner ça c’est devenu quelque chose que j’aime beaucoup. Je t’avoue que maintenant les affiches m’ennuient et que je prend beaucoup plus de plaisir à concevoir sur un paper toy ou un emballage débile… Concernant Message à Caractère Informatif, je suis membre honorifique du conseil d’administration de la COGIP et j’ai même mon pins 100% officiel. Donc oui, on pourrait éventuellement retrouver cette influence dans les détournements de romans photos pornos que je poste de temps en temps sur les réseaux sociaux. Je conseille d’ailleurs aux amateurs le moyen métrage A la recherche de l’Ultra Sex, par les mêmes auteurs, qui utilise des films pornos des années 70 en les doublant de la même façon.

Tes affiches ont l’air de te demander du temps mais l’idée qu’il y a derrière à l’air d’être assez spontanée comme une connerie sortie entre potes, sans prise de tête. Comment se déroule la conception de tes affiches et en particulier celle pour des concerts ?

Ça part souvent d’une idée marrante, un concept, un jeu de mot foireux, que je note dans mon téléphone et j’accumule comme ça des tonnes et des tonnes de matériel qui pour la plupart ne serviront jamais. Quand je suis décidé, je fais un p’tit croquis histoire de voir si graphiquement ça pourrait coller, puis je commence réellement à travailler dessus. Comme ma base de travail c’est à 80% du bidouillage de photo, il n’y a pas vraiment les étapes d’une illustration classique : crayonné, encrage, etc. Je commence souvent par une phase de recherche photographique et de travail de détourage/montage et je redessine et modifie beaucoup de choses à la tablette graphique. Ensuite, il y a la mise en page ou la créa des typos, la colorisation, et si c’est destiné à être sérigraphié il y a l’importante étape de la séparation des couleurs. Et enfin l’impression ! Pour les affiches de concert c’est la même chose sauf que j’essaye dès le départ de trouver des idées qui colleront aux thèmes ou l’état d’esprit de la soirée en travaillant les logos pour qu’ils fassent partie intégrante de l’affiche. Rien de plus triste qu’une affiche avec des logos balancés au pif sur un visuel de fond à peine visible.

 

Maxi Cat Roman Porno

Musique et roman porno

Il y a des artistes qui t’inspirent ou que tu admires ? Ta culture musicale peut influencer ton travail de graphiste ?

Niveau état d’esprit, je dirais que j’ai été pas mal inspiré par Le Tampographe Sardon pour l’humour noir un poil misanthrope, l’auteur de BD Winschluss (également coréalisateur de Persépolis (2007) avec Marjane Satrapi, ndlr) et Fluide Glacial en général. Certaines pochettes d’album m’ont marquées aussi, comme celles des albums de LARD ou des Dead Kennedys par l’artiste Winston Smith qui fait principalement du collage photo. Et aussi l’univers des séries B des années 80 et 90, les trucs mutants radioactifs, les pinups à gros seins, les excès du capitalisme et de l’agro-alimentaire, le sang… J’aime beaucoup torturer les enfants aussi, c’est assez fun. Et faire dire des choses atroces à des p’tits chatons mignons bien sûr. Graphiquement, je pense que j’ai été pas mal influencé par l’esthétique « photocopieuse » de la scène punk, même si j’essaye de m’en éloigner de plus en plus pour quelque chose de plus granuleux, organique et en même temps cartoonesque. J’aime bien la crasse, les fluides corporels, les textures granuleuses… Les trucs léchés et poétiques ce n’est pas pour moi. Pour la musique, c’est difficile à dire, étant donné que j’écoute autant du funk que du grindcore en travaillant. Ça n’influence pas vraiment mon travail graphique. Je dirais que l’influence serait plutôt dans la thématique et l’esthétique des groupes en question. Par exemple, quand j’ai travaillé sur une affiche pour le groupe américain ZIGZAGS de passage à Lille, groupe qui suinte le speed metal 80’s des premiers Metallica, j’avais direct en tête les films séries B de cette époque qui se retrouvent également dans leurs paroles.

Sur tes comptes Facebook ou Instagram, on peut voir que tu détournes régulièrement des romans pornos qui ont l’air d’être issues de magazine des années 80. Tu as des archives dans ton grenier ou ta cave ? Quand et comment as-tu commencé à le faire ?

La réponse est simple : je les trouve sur de bons gros sites de cul. Il y a apparemment sur le net une grosse communauté de passionnés (on va les appeler comme ça) ayant pris à cœur de scanner leurs archives vintages personnelles, plus ou moins tâchées, pour les partager. Du coup, je vais régulièrement là-dessus pour faire de la… hmmm… on va dire de la veille documentaire. Au départ, je cherchais juste des photos classiques de pin-ups 70’s à bidouiller pour insérer une dose d’érotisme dans mes créas (on est beauf ou pas hein) et je suis vite tombé amoureux des nombreuses photos sans aucune nudité ni sexe qui introduisent (sans mauvais jeu de mot) la plupart des romans photos pornos de l’époque. Costumes cheaps, expressions faciales des acteurs ridicules, déco super bizarre… C’était génial ! J’ai fait quelques essais et je me suis rendu compte qu’on peut faire dire à peu près n’importe quoi aux acteurs et raconter une histoire complètement différente en changeant l’ordre des photos ou en recadrant astucieusement. Bon ok, d’un point de vue externe ça doit sembler assez étrange de me voir passer des heures à scroller des pages et des pages de porno cradingue en rigolant tout seul rien qu’a l’idée d’imaginer un scénario absurde. Mais là, je commence à en avoir accumulé assez pour sortir une auto-édition. Affaire à suivre donc. En espérant que les anciens acteurs pornos ne me collent pas un procès au cul, mais à mon avis ils sont tous morts d’une overdose de coke ou de fond de teint.

 

Maxi Cat Affiches Concerts

Quels sont les groupes de musique que tu adores et que tu recommanderais ?

Question difficile ! Des groupes que je recommanderais, je dirais THEE OH SEES, MINISTRY avant 2007, NAPALM DEATH, TY SEGALL et les premiers FUNKADELIC. Sinon en ce moment j’écoute pas mal de SICK THOUGHTS et DD OWEN c’est vraiment cool. Ah ! et COBRA aussi. Forcément. Gloire à Satan et vive le hard-rock et la drogue.

Tu as déjà assisté à un concert Cerbère Coryphée ? Lequel t’as marqué ?

Un des seuls qui me vient en tête comme ça c’est le concert au DIY Café (RIP en paix) de SLIFT, KARMA SUTRA et Steal Shit Do Drugs pour lequel j’avais réalisé une affiche sérigraphiée. C’était bien cool ! Même si je t’avoue que je deviens vieux et les concerts me gonflent de plus en plus. Je reste la plupart du temps comme un gros ronchon au bar à boire des picons-bières avec les copains. Enfin, si un jour on peut retourner faire des concerts, c’est sûr que je dirais pas non !

Et au Rock In Bourlon ?

EYEHATEGOD ! C’était terrible. Bon souvenir de DDENT aussi ! Mais globalement, je trouve que le Rock In Bourlon manque vraiment de groupes de K Pop ou de zouk. C’est dommage.

Propos recueillis par Florent Le Toullec

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